Publié le mardi 16/12/2020
Mon combat pour un islam
institutionnel
Les médias belges ont fait écho aux propos du nouveau ministre de la Justice
Vincent Van Quickenborne invitant les musulmans de Belgique sur un ton injonctif à se soulever contre l’institution qui les représente. Cet appel, qui ne relève pas des
compétences du ministre, dénote non seulement une mauvaise connaissance des
affaires et des projets relatifs à la gestion publique de l’islam en Belgique mais aussi
d’un manque de discernement dans ce dossier.
D’autres allégations relayées par la presse associent mon nom à ce qui s’apparente
être un véritable lynchage public. Je ne puis cacher mon indignation qui est à son
comble comme je ne peux tolérer que ma personne soit ternie ainsi que ma famille et
mon entourage.
Il va sans dire que l’homme et les institutions sont perfectibles et toute critique constructive rend possible les changements qui s’imposent dans notre société. Mais la critique aussi légitime soit-elle ne peut faire l’économie d’une honnêteté intellectuelle stricte et inconditionnelle. Les propos diffusés par les différents canaux de la presse révèlent une rupture radicale du ministère de la Justice avec une certaine tradition de notre pays puisqu’il semble privilégier le contact avec l’organe chef du culte musulman par médias interposés. De telles affirmations défient le bon sens et désavouent toutes les créations et tous les travaux conquis au prix de
nombreuses luttes menées par des politiques et des intellectuelles, femmes et
hommes, en Communauté flamande comme en Fédération-Wallonie Bruxelles qui
ont pris en charge le dossier islam avec courage et intelligence.
Malgré les diffusions de dénonciations abjectes à mon égard, je demeure stoïque et
confiant et n’ai pas à rougir de tout le travail que j’ai entrepris ces dernières années
en collaboration avec les mondes politique et académique. Je peux sans m’enorgueillir dresser un bilan qui sur l’histoire longue de notre pays atteste d’une avancée notoire sans précédent. Dans le cadre de la « déradicalisation » et notre combat contre les discours extrémistes, j’ai eu l’honneur de travailler à la réflexion et à la création de formations pour les imams, les conseillers islamiques et les théologiennes en partenariat avec les instances de l’enseignement supérieur. J’ai
aussi collaboré avec les représentants de la KU Leuven et de l’UCLouvain à la
création de certificats de formation continue à destination du personnel cultuel. J’ai
également œuvré et obtenu du Ministère de la Justice la reconnaissance et la prise
en charge du traitement de théologiennes et de prédicatrices, une première dans
l’histoire du culte musulman en Belgique.
J’ai aussi proposé une réforme profonde du Conseil des théologiens musulmans de Belgique sans compter tout le travail de perfectionnement et de restructuration de l’Exécutif.
Dans un tout autre cadre, je suis heureux d’être le premier citoyen belge de
confession musulmane à avoir organisé avec les dignitaires juifs et d’autres cultes
ainsi que l’ancien Président du Gouvernement de la FWB, Rudy Demotte, un voyage à Auschwitz permettant aux imams, aux enseignants et conseillers dans les milieux pénitentiaires de prendre connaissance de l’histoire européenne, même dans sa phase la plus sombre. Je ne ferai pas ici état de toutes les activités que j’ai eu l’honneur d’organiser à l’occasion de rencontres interculturelles.
Quant à une supposée ingérence marocaine, j’ai toujours affirmé publiquement que
la gestion des dossiers de l’islam se gèrent dans la plus grande neutralité et la
transparence indépendamment de toute influence étrangère. Aujourd’hui, en
défendant un islam en phase avec nos valeurs démocratiques, je subis tous les jours des pressions et de sérieuses menaces qui émanent de nombreuses personnes dont les méthodes et les allégeances demeurent plus que suspectes, une réalité qui ne peut échapper à Monsieur le ministre Vincent Van Quickenborne. Dans ces circonstances, j’ai décidé de quitter, par principe, toutes les institutions liées à la
gestion du culte musulman afin de me consacrer à la défense de mes droits, de ma
dignité et de mon honneur.