ACTUALITEQuel impact COVID-19 a-t-il sur les conflits au Moyen-Orient?

Quel impact COVID-19 a-t-il sur les conflits au Moyen-Orient?

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5 avr 2020

2c1023f15b7cbc3e890a7443c560364e43219055AFP / File / AAREF WATADLe coronavirus a freiné mais nullement mis fin aux hostilités dans les multiples conflits qui ravagent le Moyen-Orient

Le nouveau coronavirus a suspendu le commerce mondial, placé la moitié de la population mondiale en détention et a le potentiel de renverser les gouvernements et de remodeler les relations diplomatiques.

L’ONU a appelé à des cessez-le-feu dans tous les grands conflits qui secouent la planète, son chef Antonio Guterres avertissant vendredi « le pire est à venir ». Mais on ignore encore quel sera l’impact de la pandémie sur les multiples guerres qui secouent le Moyen-Orient.

Voici un aperçu de l’impact à ce jour sur les conflits en Syrie, au Yémen, en Libye et en Irak:

SYRIE

L’épidémie de COVID-19 s’est transformée en pandémie juste au moment où un cessez-le-feu conclu par les deux principaux courtiers étrangers en Syrie – la Russie et la Turquie – prenait effet.

Les trois millions de personnes vivant dans la zone de cessez-le-feu, dans la région d’Idlib, dans le nord-ouest du pays, avaient peu d’espoir que l’accord tienne.

Pourtant, les craintes que le coronavirus ne se propage comme une traînée de poudre dans tout le pays dévasté semblent avoir donné à la trêve une durée de vie prolongée.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, le mois de mars a vu le bilan civil le plus bas depuis le début du conflit en 2011, avec 103 morts.

La capacité des multiples administrations en Syrie – le gouvernement de Damas, l’administration kurde autonome dans le nord-est et l’alliance dirigée par les djihadistes qui dirige Idlib – à gérer la menace des coronavirus est la clé de leur crédibilité.

« Cette épidémie est un moyen pour Damas de montrer que l’État syrien est efficace et que tous les territoires doivent être restitués sous sa gouvernance », a expliqué l’analyste Fabrice Balanche.

Cependant, la pandémie et la mobilisation mondiale qu’elle nécessite pourraient précipiter le départ de troupes dirigées par les États-Unis de Syrie et d’Irak voisin.

Cela pourrait à son tour créer un vide dans lequel le groupe djihadiste État islamique, encore sous le choc de la disparition de son « califat » il y a un an, pourrait chercher à intensifier ses attaques.

YÉMEN

Le gouvernement yéménite et les rebelles Huthi ont initialement répondu positivement à l’appel de l’ONU pour un cessez-le-feu, tout comme l’Arabie saoudite voisine, qui dirige une coalition militaire en soutien au gouvernement.

Cette rare lueur d’espoir dans le conflit de cinq ans a cependant été de courte durée et la semaine dernière, les défenses aériennes saoudiennes ont intercepté des missiles balistiques au-dessus de Riyad et d’une ville frontalière tirée par les rebelles soutenus par l’Iran.

La coalition dirigée par l’Arabie saoudite a riposté en frappant lundi des cibles huthi dans la capitale tenue par les rebelles, Sanaa.

Les pourparlers ont à plusieurs reprises échoué, mais l’envoyé de l’ONU, Martin Griffiths, tient des consultations quotidiennes afin de conclure un cessez-le-feu à l’échelle nationale.

De nouvelles poussées au Yémen pourraient aggraver une crise humanitaire souvent décrite comme la pire au monde et provoquer une épidémie de coronavirus aux proportions catastrophiques.

Dans un pays où les infrastructures sanitaires se sont effondrées, où l’eau est une denrée rare et où 24 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire, la population craint d’être anéantie si un cessez-le-feu ne permet pas une aide adéquate.

« Les gens finiront par mourir dans les rues, les corps pourriront en plein air », a déclaré Mohammed Omar, chauffeur de taxi dans la ville portuaire de Hodeida, sur la mer Rouge.

LIBYE

Tout comme au Yémen, les principaux protagonistes du conflit libyen ont initialement salué l’appel au cessez-le-feu de l’ONU, mais ont rapidement repris les hostilités.

Des combats acharnés ont secoué le sud de la capitale Tripoli ces derniers jours, ce qui suggère que le risque d’une épidémie majeure de coronavirus ne suffit pas à faire taire les armes à feu.

La Turquie a récemment joué un rôle clé dans le conflit, mettant son poids derrière le gouvernement d’accord national reconnu par l’ONU.

Fabrice Balanche a prédit que l’accélération du désengagement occidental des conflits du Moyen-Orient pourrait limiter le soutien turc au GNA.

Cela pourrait éventuellement favoriser les forces fidèles à l’homme fort basé à l’Est Khalifa Haftar, qui a lancé un assaut sur Tripoli il y a un an et a le soutien de la Russie, de l’Égypte et des Émirats arabes unis.

Les pays occidentaux ont été les plus durement touchés par la pandémie, ce qui pourrait les inciter à détourner à la fois les ressources militaires et les capacités de courtage de la paix des conflits étrangers.

Un rapport de l’International Crisis Group a déclaré que des responsables européens avaient signalé que les efforts pour obtenir un cessez-le-feu en Libye ne recevaient plus l’attention de haut niveau en raison de la pandémie.

IRAK

L’Irak n’est plus saisi par un conflit à part entière, mais il reste vulnérable à une résurgence de l’EI dans certaines régions et ses deux principaux bailleurs de fonds étrangers sont à la gorge l’un de l’autre.

L’Iran et les États-Unis sont deux des pays les plus touchés par le coronavirus, mais il n’y a eu aucun signe de relâche dans leur bataille pour une influence qui s’est largement déroulée sur le sol irakien.

La plupart des troupes non américaines de la coalition ayant disparu et certaines bases évacuées, le personnel américain est maintenant regroupé dans une poignée d’endroits en Irak.

Washington a déployé des missiles de défense aérienne Patriot, ce qui fait craindre une nouvelle escalade avec Téhéran, dont il accuse les mandataires d’une série d’attaques à la roquette sur des bases abritant des troupes américaines.

Source AFP

Lahcen Hammouch
Lahcen Hammouchhttps://www.almouwatin.com/
Lahcen Hammouch est journaliste. CEO de Bruxelles Media. Sociologue à l'ULB. Président du Forum de la société civile africaine pour la démocratie.
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