Les deux otages français libérés par les forces spéciales françaises dans le nord du Burkina Faso, au prix de la mort de deux militaires, ont été reçus samedi par le président burkinabè Roch Marc Christian Kaborè avant de s’envoler pour Paris où ils doivent être accueillis par le président Emmanuel Macron.
Les premiers mots en public de l’ex-otage Laurent Lassimouillas ont été pour les soldats français tués lors de l’opération de libération: « Toutes nos pensées vont aux familles des soldats et aux soldats qui ont perdu la vie pour nous libérer de cet enfer. On voulait présenter nos condoléances tout de suite », a-t-il dit, visiblement éprouvé.
Patrick Picque et Laurent Lassimouillas avaient été enlevés le 1er mai pendant un séjour touristique au Bénin, pays jusque-là épargné par l’insécurité en Afrique de l’Ouest mais dans une zone déconseillée par le ministère des Affaires étrangères français. Ils ont été libérés dans la nuit de jeudi à vendredi en même temps qu’une Sud-Coréenne et une Américaine qui étaient captives depuis 28 jours.
« On voulait remercier les autorités françaises et celles du Burkina d’avoir participé à notre libération pour que nous soyons loin de tout cet enfer », a poursuivi M. Lassimouillas.
Il a également déclaré avoir « une pensée » pour leur « chauffeur-guide béninois qui a perdu la vie au tout début de notre (leur) enlèvement. Ca a été très difficile aussi ». Le corps du guide a été découvert le 4 mai dans le parc national de la Pendjari où ils effectuaient un safari.
Les deux Français et l’ex-otage sud-coréenne sont arrivés samedi matin au Palais présidentiel de Ouagadougou, sans l’ex-otage américaine.
Visages fermés, vêtus de bas de survêtements noirs et de T-shirts sombres, ils n’ont pas fait d’autres déclarations. Ils sont ensuite partis vers l’aéroport de Ouagadougou et sont attendus à 18H00 (16H00 GMT) sur la base de Villacoublay, près de Paris. Ils seront accueillis par le président Macron.
Le ministre des Affaires étrangères burkinabè Alpha Barry, qui a précisé que l’ex-otage américaine se trouvait « avec les Américains », a mis l’accent sur « la coopération entre le Burkina et la France notamment sur les questions de sécurité au Sahel ».
« La libération des otages est la preuve que cette coopération marche assez bien. Les forces françaises qui sont des forces alliées dans notre pays peuvent mener des opérations en collaboration et en coopération avec les forces burkinabé », a-t-il souligné. Il a ajouté qu’une « quinzaine de militaires burkinabé » avait participé à cette opération.
– Hommage national-
Un hommage national sera rendu mardi à Paris aux deux militaires français tués au cours cette intervention « d’une très grande complexité », selon les mots de la ministre des Armées Florence Parly.
Membres du commando Hubert, unité d’élite de la Marine française, le maître Cédric de Pierrepont et le maître Alain Bertoncello ont été salués comme des « héros » par l’ensemble de la classe politique française.
« Ils ont donné leur vie pour en libérer d’autres », a écrit Emmanuel Macron sur Twitter.
L’opération de libération des otages a été « rendue possible par la mobilisation des moyens de (la force antijihadiste française au Sahel) Barkhane, le soutien logistique des forces burkinabè et le soutien américain en renseignement », a déclaré le chef d’état-major français, le général François Lecointre.
Quant aux deux autres otages libérées, l’Américaine et la Sud-Coréenne, « personne n’avait connaissance de leur présence » au Burkina, a-t-il dit.
Les Français suivaient l’évolution des ravisseurs depuis plusieurs jours et ont saisi l’opportunité d’agir en raison du risque « de transfèrement de ces otages à une autre organisation terroriste qui agit au Mali (…) la Katiba Macina » du prédicateur Amadou Koufa, ce qui aurait dès lors « rendu impossible d’organiser une quelconque opération de libération », a-t-il détaillé.
L’identité des preneurs d’otages est encore inconnue.
– « Zone rouge » –
« Ce que l’on peut dire c’est qu’il y a deux mouvements terroristes principaux qui opèrent dans cette zone et qui sont affiliés pour l’un à Al Qaïda, pour l’autre à l’EIGS (État islamique au Grand Sahara) », a déclaré la ministre française des Armées, Florence Parly.
Les attaques jihadistes, concentrées initialement dans le nord du Mali, se sont étendues vers le centre du pays puis vers le Burkina Faso et menacent désormais les pays côtiers du Golfe de Guinée, jusque-là épargnés.
« Il faut maintenir la pression sur ces groupes », a estimé samedi sur la radio Europe 1 le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian, jugeant l’action de la force française Barkhane « tout à fait essentielle » dans ce contexte.
Cette force antijihadiste compte 4.500 soldats sur cinq pays du Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad et Mauritanie). M. Le Drian a rappelé que « la zone où étaient nos deux compatriotes était considérée depuis déjà pas mal de temps comme une zone rouge, c’est-à-dire une zone où il ne faut pas aller, où on prend des risques majeurs si on y va ».
Source AFP