- Athéisme (nom commun)
- Doctrine qui nie l’existence de dieux, en particulier d’un Dieu unique et transcendant.
Un terme marqué par le monothéisme
L’athéisme nie l’existence d’un ou de dieux. Cependant l’athéisme vise souvent le Dieu pensé par les monothéismes. Se dire athée, c’est en général rejeter l’existence d’un dieu :
- unique
- transcendant
- créateur du monde
On peut être athée parce qu’on nie l’existence des dieux polythéistes, mais cet usage est beaucoup moins prégnant. L’athéisme semble ainsi relatif à une conception donnée de dieu. On est ou se dit athée par rejet d’une vision de la divinité. L’athéisme n’implique alors par le rejet de toute forme de religion.
L’Antiquité connaît peu de doctrines réellement athées. Il existe de nombreuses critiques de la superstition, de l’anthropomorphisme, mais rares sont ceux qui affirment la non existence des dieux. Protagoras refuse de se prononcer sur l’existence des dieux. Épicure nie leur intervention dans la vie humaine. Ces positions ne sont pas strictement athées, même si elles ont parfois été accusée de l’être.
Théoriquement, l’athéisme est lié au monisme matérialiste. Nier l’existence des dieux va souvent avec l’affirmation que seule la matière est substance. Le monde est intégralement matériel. Si Dieu n’existe pas, c’est parce qu’il ne s’intègre pas dans un monde où exister, c’est être matériel. Un Dieu transcendant et immatériel n’y a pas sa place. Toutefois certains matérialistes, comme Hobbes, n’hésiterons pas à affirmer que Dieu est matériel.
Une position de rupture
Les dieux occupent traditionnellement une place importante dans les sociétés. Les ordres politiques, moraux et sociaux ont longtemps été fondés sur la croyance et la pratique religieuse. L’athéisme a donc une signification morale et politique. C’est une position de rupture, qui rejette les fondements théoriques des sociétés traditionnelles.
Les athées ont été accusés d’être immoraux, voire de ne pas pouvoir être moraux du tout (!). Un penseur comme Locke explique très sérieusement qu’on ne peut pas vivre en société avec des athées : ils minent le lien social. L’athéisme n’est pas bien reçu dans les sociétés traditionnelles. Les athées sont réprimés, voire persécutés. L’athéisme peut être interdit par loi, ou culturellement inacceptable. Ces phénomènes se retrouvent encore aujourd’hui : aux États Unis, l’athéisme n’est pas socialement reconnu partout.
Il existe deux traditions d’athéisme : un athéisme assumé et revendiqué, et un autre dissimulé et clandestin. Les Lumières représentent le premier, le courant libertin le second. Dans les pays laïcs l’athéisme est censé être accepté et ne plus être condamné. L’opposition visible est alors celle entre athéisme militant et athéisme indifférent. Soit une position qui lutte contre les croyances religieuses, soit une position d’indifférence, qui ignore les croyances des autres sans chercher à les combattre.
Une stratégie de dénigrement
Accuser d’athéisme est une stratégie de dénigrement depuis l’Antiquité. On s’appuie sur l’importance sociale des dieux pour attaquer quelqu’un au nom de son athéisme réel ou supposé. Cette manœuvre est notoirement efficace : c’est elle qui envoie Socrate en procès (il croit en d’autres dieux que ceux de la cité), c’est elle qui exile Protagoras (il dit qu’il ignore si les dieux existent).
L’accusation d’athéisme ne vise pas que ceux dont on sait qu’ils nient sincèrementl’existence des dieux. Elle s’étend de façon globale à tous ceux :
- qu’on soupçonne d’afficher des croyances différentes de leurs convictions
- dont les conceptions sont jugées inacceptables, hérétiques ou peu canoniques
Nombre de philosophes ont été accusés d’athéisme. Défenseurs d’opinions éloignées des dogmes et du sens commun, les philosophes sont des cibles de choix pour cette l’accusation. Même des penseurs chez qui Dieu est omni-présent ont été perçus comme des crypto-athées : Spinoza et Hegel par exemple.
Source : Dicophilo