Les Émirats arabes unis ont rouvert jeudi leur ambassade à Damas, nouveau signe d’un possible réchauffement des relations entre les pays arabes et le pouvoir syrien de Bachar al-Assad, et Bahreïn pourrait suivre.
L’initiative intervient au moment où les forces pro-gouvernementales syriennes, soutenues par les deux indéfectibles alliés, l’Iran et la Russie, contrôlent aujourd’hui près des deux-tiers du pays, multipliant les victoires face aux rebelles et aux jihadistes.
La Syrie avait été mis au ban du monde arabe dès la fin 2011, et des pays, notamment du Golfe, avaient rappelé leurs ambassadeurs, pour protester contre la répression menée par le pouvoir de Damas contre des manifestations pro-démocratie, avant de soutenir pour certains l’opposition en exil et les rebelles armés.
Jeudi, le drapeau des Émirats arabes unis a été hissé sur le bâtiment de l’ambassade, dans le quartier huppé d’Abou Roumaneh, lors d’une cérémonie à laquelle ont été conviés des diplomates en poste en Syrie, notamment arabes, a constaté un correspondant de l’AFP.
« L’ambassade des Émirats arabes unis à Damas a repris ses activités », a annoncé dans un communiqué le ministère des Affaires étrangères émirati, précisant qu’un chargé d’affaires par intérim prenait ses fonctions à compter de jeudi.
« Un rôle arabe en Syrie est devenu encore plus nécessaire face à l’expansionnisme régional de l’Iran et de la Turquie », a justifié sur Twitter Anwar Gargash, ministre d’État aux Affaires étrangères des Émirats. « À travers leur présence à Damas, les Émirats cherchent à activer ce rôle » arabe, a-t-il souligné.
– Normalisation arabe? –
La réouverture de l’ambassade était évoquée depuis plusieurs semaines alors que des travaux de rénovation étaient menés dans le bâtiment.
De plus, un autre pays du Golfe, Bahreïn, qui avait fermé sa mission diplomatique à Damas en mars 2012, a annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi, quelques heures après l’annonce des Émirats arabes unis, la « poursuite » des travaux à son ambassade en Syrie, signifiant son intention de la rouvrir.
Bahreïn est « soucieux de poursuivre les relations » avec la Syrie et souhaite « renforcer le rôle arabe et le réactiver afin de préserver l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie et prévenir le risque d’ingérence régionale dans ses affaires intérieures », a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué en arabe.
C’est en février 2012 que les Émirats et les autres pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) avaient annoncé le retrait de leurs ambassadeurs de Syrie, dénonçant dans un communiqué commun le « massacre collectif » commis par le pouvoir syrien.
La répression des manifestations s’est rapidement transformée en un conflit complexe aux multiples acteurs, dont plusieurs puissances étrangères et groupes jihadistes, qui a fait plus de 360.000 morts.
La réouverture de l’ambassade des Émirats semble être un pas de plus vers une normalisation des relations entre la Syrie et les pays arabes, sept ans après le déclenchement de la guerre.
« La reprise des activités à l’ambassade, c’est une invitation pour la reprise des relations et la réouverture des autres ambassades arabes », a indiqué le chargé d’affaires émirati Abdel Hakim al-Naïmi.
Le 16 décembre, le président soudanais Omar el-Béchir avait effectué une visite surprise à Damas pour rencontrer Bachar al-Assad. Il s’agissait de la première visite d’un chef d’État arabe dans la capitale syrienne depuis 2011.
Le plus haut responsable des services de sécurité syriens, le général Ali Mamlouk, s’est rendu au Caire le 22 décembre pour s’entretenir avec son homologue égyptien, sa deuxième visite officielle depuis 2016 en Egypte, où siège la Ligue arabe.
Par ailleurs, il semblerait que la suspension de la Syrie à la Ligue arabe, décidée en novembre 2011, ne fasse plus l’unanimité.
Mais le secrétaire général adjoint de cette organisation, Hossam Zaki, avait déclaré le 24 décembre qu’il n’y avait pas de « consensus » au sein de l’organisation pour un retour de la Syrie à la Ligue, qui doit tenir son sommet annuel fin mars à Tunis.
« Cela n’écarte pas la possibilité d’un changement de la position arabe à l’avenir », avait toutefois ajouté M. Zaki, sans donner plus dé détails.
– Reconstruction en vue –
Outre le front diplomatique, les autorités syriennes cherchent également à relancer les liens économiques avec les voisins régionaux.
En octobre, le poste-frontière de Nassib, à la frontière avec la Jordanie, une plaque tournante du commerce régional, a été rouvert en grande pompe.
La compagnie aérienne privée syrienne Cham Wings a par ailleurs effectué jeudi un vol commercial avec la Tunisie, le premier depuis 2011.
« Ce vol est une reprise des liens touristiques entre Damas et la Tunisie », a indiqué à l’AFP le directeur de la compagnie aérienne, Moataz Tarbin.
Et alors que les combats en Syrie ont baissé en intensité, la reconstruction se profile à l’horizon, dans un pays ravagé par des années de guerre, où des villes entières ne sont plus que champs de ruine.
« L’Arabie saoudite a désormais accepté de dépenser l’argent nécessaire pour aider à reconstruire la Syrie, à la place des États-Unis », a annoncé lundi sur son compte Twitter le président américain Donald Trump
Source AFP