Plus de cent pays se retrouvent lundi et mardi à Marrakech pour approuver formellement le Pacte mondial sur les Migrations piloté par l’ONU, malgré les défections et les crispations suscitées par ce texte sans précédent.
Mais le document a déchaîné les passions depuis son adoption en juillet dernier à New York et seuls deux-tiers des quelque 190 pays qui l’avaient validé ont pour l’instant confirmé leur présence, avec des niveaux disparates de représentation.
Plus de cent pays se retrouvent lundi et mardi à Marrakech pour approuver formellement le Pacte mondial sur les Migrations piloté par l’ONU, malgré les défections et les crispations suscitées par ce texte sans précédent.
Sans vote ni signature, la conférence intergouvernementale organisée dans cette ville du centre du Maroc, devait être une simple étape formelle du processus lancé il y a 18 mois pour renforcer la coopération internationale en vue d’une « migration sûre, régulière et ordonnée ».
Mais le document a déchaîné les passions depuis son adoption en juillet dernier à New York et seuls deux-tiers des quelque 190 pays qui l’avaient validé ont pour l’instant confirmé leur présence, avec des niveaux disparates de représentation.
Non contraignant, ce texte recense des principes -défense des droits de l’homme, des enfants, reconnaissance de la souveraineté nationale- et liste des propositions pour aider les pays à faire face aux migrations -échanges d’information et d’expertises, intégration des migrants… Il interdit les détentions arbitraires, n’autorisant les arrestations qu’en dernier recours.
L’Italie, l’Autriche, la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, l’Estonie, la Lettonie, la Suisse, l’Australie, Israël et la République dominicaine ont décidé de ne pas se rendre à Marrakech. Les Etats-Unis s’étaient retirés de l’élaboration du Pacte en affirmant qu’il comprenait des dispositions contraires à la politique d’immigration de Donald Trump.
Malgré ces désistements, la représentante spéciale de l’ONU pour les migrations, Louise Arbour, s’est dite « très confiante » sur l’avenir du texte qui fera l’objet d’une résolution finale de l’ONU le 19 décembre à New York.
– « Texte controversé » –
« Des Etats en grand nombre continuent de tenir parole, ils se sont entendus (…) après des négociations très sérieuses et très intenses. Les pays qui se désengagent aujourd’hui avaient quand même obtenu des concessions de leurs partenaires pendant les négociations et je dois avouer que je trouve cela un peu surprenant », a-t-elle dit à l’AFP.
Les défenseurs des droits de l’Homme trouvent le pacte insuffisant, surtout sur l’accès des migrants à l’aide humanitaire et aux services de base ou sur les droits des travailleurs migrants.
Ses détracteurs le voient comme un encouragement à un flux migratoire incontrôlé ou comme une atteinte à la souveraineté nationale.
C’est un « texte controversé », mais « la migration requiert une approche internationale », souligne Götz Schmidt-Bremme, le co-président du Forum mondial sur la migration et le développement (FMMD), réuni cette semaine à Marrakech en amont de la conférence.
« Peut-être que l’on a trop affiché les avantages de la migration légale en oubliant les défis: on a sous-estimé les besoins des communautés qui veulent surtout voir les migrants s’intégrer » et « s’inquiètent de la migration illégale », a-t-il déclaré à l’AFP.
Les participants à ce Forum annuel ont plaidé pour une migration « légale et ordonnée », alors qu’une vaste campagne de désinformation sur les enjeux du texte agite les réseaux sociaux. Plusieurs orateurs ont insisté sur la nécessité « d’organiser la mobilité plutôt que de fermer les frontières », pour répondre aux besoins de main-d’œuvre dans les pays en voie de vieillissement démographique.
– « Manipulations » –
« Nous assistons de la part de certains secteurs politiques à la manipulation, à la distorsion des objectifs du Pacte », s’est inquiété Antonio Vitorino, le patron de l’Organisation internationale des Migrations (OIM). « Certes il y a des défis, l’immigration irrégulière est une menace, mais il faut réagir devant le narratif négatif par une mobilisation politique ».
Côté européen, la chancelière allemande Angela Merkel a annoncé sa venue à Marrakech après le feu vert houleux du Bundestag. Les chefs de gouvernements espagnol, grec et portugais feront aussi le déplacement, selon des informations obtenues par l’AFP.
Le président français Emmanuel Macron va déléguer le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères. Cette décision a suscité une « grande déception » du Maroc qui voit cette conférence comme un « moment historique », selon une source diplomatique locale.
« Il y a une question d’opportunité politique: aller à Marrakech aujourd’hui, c’est offrir un boulevard à tous ceux qui critiquent le Pacte, avec un risque de mauvais signal à la population », analyse un observateur européen.
D’autant qu’en France, comme en Allemagne, au Pays-Bas ou en Belgique, l’extrême droite focalise sa campagne pour les élections européennes de mai 2019 sur la question migratoire et mobilise contre le Pacte, dans un contexte général de montée du nationalisme et du populisme.
En Belgique, la volonté du Premier ministre d’être présent à Marrakech a précipité son gouvernement dans une crise du fait du blocage des nationalistes de sa coalition.
Il y a environ 258 millions de personnes en mobilité et migrants dans le monde -soit 3,4% de la population mondiale- et leurs transferts financiers représentent environ 450 milliards de dollars, soit 9% du PIB mondial, selon les chiffres de l’ONU
Source AFP