5 Déc 2018
Le gouvernement britannique a essuyé une nouvelle vague de critiques mercredi au Parlement alimentée par la publication de l’avis de son conseiller juridique sur l’accord de Brexit conclu entre Bruxelles et la Première ministre Theresa May.
Dans ce document, dont les députés ont exigé la publication intégrale, l’Attorney general souligne que Londres pourrait être « soumis à des cycles de négociations très longs et répétés » pour obtenir un nouvel accord définissant la relation future entre le Royaume-Uni et l’UE.
Il prévient que l’alignement règlementaire de la province britannique d’Irlande du Nord sur l’UE afin d’éviter une frontière physique avec la République d’Irlande après le Brexit, prévu pour le 29 mars 2019, pourrait « perdurer indéfiniment » dans l’attente de la conclusion du nouvel accord.
Ces dispositions, désignées par le terme de « filet de sécurité », nourrissent le mécontentement des députés eurosceptiques, qui demandent une franche rupture avec l’UE, et du parti nord-irlandais DUP, pourtant allié au gouvernement, qui refuse tout traitement spécifique pour l’Irlande du Nord, y voyant une atteinte à l’intégrité du Royaume-Uni, et juge le texte « inacceptable ».
Partisans comme adversaires du Brexit ont ainsi prévenu qu’ils s’opposeraient à l’accord de divorce, qui sera soumis à leur vote le 11 décembre au terme de cinq jours de débats.
Theresa May a même été accusée par le député nationaliste écossais Ian Blackford d’avoir cherché à « induire en erreur » les parlementaires en refusant initialement de publier cet avis juridique susceptible de renforcer l’opposition à son accord.
Le ministre de l’Intérieur, Sajid Javid, en a aussi pris pour son grade : ses promesses de maintenir une coopération avec l’UE en matière de sécurité après le Brexit ont été jugées dignes d' »une liste de cadeaux envoyée au Père Noël », selon le député travailliste Chris Bryant.
Le Royaume-Uni comme l’UE ont jusqu’à présent écarté la possibilité de renégocier le texte, contrairement à ce que demandent des députés opposés à Theresa May.
– Opposition du Parlement écossais –
Mardi, le gouvernement avait essuyé un sérieux revers, les députés estimant qu’il s’était rendu coupable d' »outrage au Parlement » en refusant de publier l’intégralité de l’avis juridique et obtenant sa publication le jour suivant.
Alors que Theresa May peine à réunir une majorité pour adopter l’accord, fruit de 17 mois de difficiles négociations entre Londres et Bruxelles, le parlement écossais a quant à lui déjà tranché en rejetant le texte.
Par 92 voix contre 29, les députés écossais ont adopté mercredi une motion écartant à la fois l’accord de divorce négocié par Theresa May et l’hypothèse d’une sortie du Royaume-Uni de l’UE sans accord, appelant à trouver une « meilleure » option, dans un vote purement symbolique.
L’Ecosse avait voté contre la sortie de l’UE au référendum de juin 2016
Pendant ce temps, à Bruxelles, le processus de ratification du texte par la Commission a commencé. « Nous devons bien sûr connaître le résultat des discussions au Parlement britannique et du vote », a déclaré le vice-président de la Commission européenne Valdis Dombrovskis. « Mais nous nous préparons ».
– « Réconciliation » –
La cheffe du gouvernement britannique ne cesse de répéter que le Traité de retrait est « la seule solution » pour mener à bien le Brexit. « Je continue à écouter les collègues là-dessus et à réfléchir au moyen d’avancer », a-t-elle dit aux députés mercredi.
Mais l’accord fédère les mécontentements au sein de l’opposition et jusque dans les rangs de la majorité, la plaçant dans une position d’extrême faiblesse et laissant planer de gros doutes sur le vote du Parlement.
Le chef des travaillistes, Jeremy Corbyn, l’a jugé « mauvais » pour le Royaume-Uni et son économie, estimant que Theresa May avait seulement réussi à réunir une « extraordinaire coalition » contre elle.
L’ex-ministre conservateur des Affaires étrangères, Boris Johnson, a qualifié le texte d' »humiliation nationale tournant le Brexit en dérision ».
Dans un Royaume-Uni toujours profondément divisé, deux ans et demi après le référendum sur le Brexit, l’achevêque de Canterbury, Justin Welby, a appelé mercredi à la « réconciliation nationale ».
Source AFP