L’indépendance du Maroc se fête le 18 novembre. L’événement marque l’anniversaire de l’accession au trône du roi Mohammed V mais étant donné que c’est en grande partie grâce à lui que le Maroc a obtenu son indépendance, cette date a été choisie pour fêter cette occasion et se souvenir des bonnes actions de ce Roi exceptionnel. Les Marocains commémorent par cette occasion la fin du Protectorat français et l’entrée dans le Maroc « moderne ».
Que s’est-il passé ?
C’est en 1912, que le Maroc devient protectorat français par la signature du Traité de Fès le 30 mars. Le sultan Moulay Hafiz s’engage à ne conclure aucune alliance avec un autre pays que la France et à ne contracter aucun emprunt auprès d’une autre puissance. De son côté, la France promet de respecter le sultan et la religion musulmane. Les pouvoirs du gouvernement français au Maroc seront détenus par un commissaire général de la République. Le général Lyautey (personnalité encore appréciée au Maroc aujourd’hui pour son ouverture d’esprit), est le premier à exercer cette fonction.
A la mort du sultan Moulay, en 1927, c’est Mohammed V, son fils, l’héritier de la dynastie chérifienne alaouite, qui est choisi par les autorités françaises comme sultan du Maroc. Les relations sont cordiales, même si un vent de liberté commence à souffler fortement. Ce sont les positions et les mesures antisémites du gouvernement de Vichy pendant la seconde Guerre mondiale, qu’il refuse de suivre, qui déclenchent chez le Sultan une vraie opposition.
Dès 1944, il soutient avec son fils, le futur roi Hassan II, l’Istiqlal, mouvement nationaliste marocain qui réclame l’indépendance du Maroc. Et en 1947, dans son fameux « Discours de Tanger », il réclame l’indépendance. Les relations sont alors très tendues, des manifestations, souvent suivies d’émeutes, secouent le pays, notamment en 1952. La France réagit fortement : en 1953, Mohammed V est arrêté et déporté en Corse puis à Madagascar. C’est son oncle, Mohammed Ibn Arafa qui le remplace sur le trône. Le peuple marocain, soudé, soutient son souverain en exil et le Maroc, entre 1952 et 1955, devient le lieu de violences et d’attentats. A tel point que, en 1955, le gouvernement français se voit contraint à négocier et à rappeler le sultan. Le 6 novembre 1955, le président du Conseil Edgar Faure, reconnait Mohammed V Ben Youssef Sultan du Maroc. Le gouvernement français renonce au protectorat. Tiraillée entre les premiers signes de guerres d’indépendance en Afrique du nord, la France préfère consacrer ses forces armées pour l’Algérie.
Le sultan Mohammed V, contraint à l’exil, rentre au Maroc le 16 novembre 1955 où il est accueilli triomphalement. Le 18 novembre 1955, jour de la fête du trône, il célébre la prière du vendredi dans les ruines de la mosquée Hassan et prononce un discours du trône qui scelle l’entrée du Maroc dans son ère moderne, sous le sceau de l’indépendance et de la démocratie. L’indépendance est officiellement proclamée le 2 mars 1956 et en aout 1957, le sultan Mohammed V se proclame roi du Maroc.
Pourquoi la date du 18 novembre 1955 célèbre-t-elle une indépendance qui n’est réelle qu’à dater du 2 mars 1956?
En fait, pour 2 raisons majeures. Tout d’abord parce que cette date coïncide avec la célébration de la fête du trône sous le règne de Mohammed V, sur l’esplanade de la tour Hassan à Rabat et ce, quelques jours après son retour de l’exil, le 10 novembre de la même année. La symbolique est forte !Ensuite parce que célébrer la fête d’indépendance le 2 mars aurait pu être interprété comme une célébration d’un parti politique au détriment de la royauté alaouite. Car le parti Istiqlal qui joua un rôle prépondérant dans l’accès à l’indépendance, était déjà un peu trop sous les feux de la rampe au goût du monarque.
L’avenir confirma ce choix judicieux. Il aurait en effet été impossible sous le règne de Hassan II, compte tenu de la personnalité de celui-ci, de confondre fête de l’indépendance et fête du trône. Or la fête du Trône sous Hassan II se célébrait le 3 mars… et ceux qui ont connu l’ère Hassan II se rappellent ces interminables célébrations de la fête du trône qui duraient pratiquement tout le mois, à la Gloire de Sa Majesté, Dieu Le protège. Quant à la politique de Hassan II, reste à savoir si elle exprimait réellement la construction d’un Maroc moderne, libre et démocratique, tel que son père Mohammed V l’avait envisagé. Quelle place aurait-on pu trouver un 2 mars à la fête célébrant le Maroc Moderne dans ce contexte ?
C’est donc le 18 novembre que les Marocains peuvent bénéficier d’un jour de repos au titre d’une indépendance ardemment souhaitée et qui fut, tout compte fait, plutôt bien gérée de part et d’autre. Ce qui explique que, contrairement à d’autres anciennes colonies ou protectorats, la France entretienne avec le Maroc des relations, faites de hauts et de bas diplomatiques, certes, mais néanmoins relativement saines.
Almouwatin