Le Kurdistan d’Irak a commencé à élire dimanche son nouveau Parlement, un an après le fiasco du référendum d’indépendance de cette région autonome en lutte pour se reconstruire économiquement.
Les résultats, qui seront connus sous 72 heures selon la commission électorale, devraient peser selon les experts sur l’élection lundi par le Parlement fédéral à Bagdad du président de la République d’Irak, un poste traditionnellement réservé à un Kurde.
Jusqu’à 15H00 GMT, près de 3,1 millions d’électeurs éliront 111 députés parmi 673 candidats issus de 29 mouvements politiques -11 sièges sont réservés aux minorités ethniques et religieuses turkmène, chrétienne et arménienne.
Le Kurdistan qui regroupe trois provinces et autonome depuis 1991, est aujourd’hui forcé de renégocier avec le pouvoir à Bagdad qui a coupé court il y a un an à ses velléités d’indépendance.
Il faut, dit à l’AFP Hawraz Salar, 26 ans, avant de déposer son bulletin dans une urne d’une école d’Erbil, la capitale du Kurdistan, « ouvrir une nouvelle page après les problèmes du référendum et de la guerre contre le groupe Etat islamique (EI) » défait en 2017.
En septembre 2017, les Kurdes avaient massivement voté pour la sécession, contre l’avis de Bagdad et de la communauté internationale. En rétorsion, le pouvoir central leur a repris les zones disputées et surtout, les revenus vitaux du pétrole.
– « S’occuper des pauvres » –
Le rêve d’un Etat en est mort. Erbil, qui a perdu sa mainmise sur l’exportation de 550.000 barils par jour, n’obtient plus désormais qu’environ 12% du budget fédéral –un milliard de dollars par mois.
Mais cela reste peu pour combler le déficit dans une économie basée sur la rente pétrolière et grevée par un fonctionnariat pléthorique.
De plus, le combat contre les jihadistes avait grévé les budgets de l’Etat central comme du Kurdistan et plongé le nord de l’Irak dans le chaos durant trois ans.
A Souleimaniyeh, la deuxième ville du Kurdistan, Soran Rassoul, chômeur, a l’économie pour priorité. « Les futures autorités doivent s’occuper des gens et en particulier des plus pauvres ».
Selon un récent rapport de l’ONU, 87% des foyers de la région autonome vivent avec moins de 850 dollars par mois.
D’autres toutefois, comme Karouan Abou Bakr, 42 ans, venu voter à Erbil en habit traditionnel kurde, veulent faire revivre l’enthousiasme du référendum porté par Massoud Barzani, qui a quitté la présidence du Kurdistan après cette consultation aux conséquences désastreuses.
Il faut, dit-il à l’AFP, « un Parlement fort afin qu’il travaille à former un Etat kurde et une société moderne et démocratique ».
– Compétition kurde à Bagdad –
Cette année, le scrutin a une importance particulière puisqu’il intervient à la veille de l’élection d’un président de la République par les députés à Bagdad.
Réservé à un kurde, ce poste a jusqu’ici toujours échu à un candidat de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), du défunt président irakien Jalal Talabani.
Mais cette année, pour la première fois, le parti de Massoud Barzani, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK), présente un candidat.
Il s’agit de Fouad Hussein, l’ancien directeur de cabinet de M. Barzani, qui multiplie les visites à Bagdad, comme le favori, le Premier ministre du Kurdistan, Barham Saleh de l’UPK.
Les experts prédisent une augmentation du nombre des députés du PDK -actuellement première force du Parlement kurde avec 38 sièges- qui pourrait peser sur l’élection.
L’UPK dispose actuellement de 18 sièges, Goran (changement, en kurde) est la principale force d’opposition avec 24 sièges, suivi de l’Union islamique (10 sièges) et de la Jamaa Islamiya (6 sièges).
La seule nouvelle force en présence est le mouvement « Nouvelle Génération », formé en 2018 et qui a remporté quatre sièges au Parlement central à Bagdad lors des législatives de mai en Irak.
Source : AFP